Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement,
Vu le code d'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code rural, et notamment le chapitre II du titre IV du livre II relatif à la protection de la nature ;
Vu le décret no 97-34 du 15 janvier 1997 relatif à la déconcentration des décisions administratives individuelles, ensemble le décret no 97-1204 du 19 décembre 1997 pris pour l'application à la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement du 1o de l'article 2 dudit décret ;
Vu l'arrêté du préfet des Ardennes en date du 2 avril 1993 prescrivant l'ouverture d'une enquête publique sur le projet de classement en réserve naturelle de la pointe de Givet ;
Vu le dossier de l'enquête publique ouverte sur le projet, notamment le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur ;
Vu les délibérations des conseils municipaux de Charnois le 18 juin 1993, Chooz le 11 juin 1993, Foisches le 12 mai 1993, Fromelennes le 28 avril 1993, Givet les 14 avril et 19 mai 1993 et Rancennes le 8 juin 1993 ;
Vu l'avis de la commission départementale des sites perspectives et paysages du département des Ardennes siégeant en formation de protection de la nature le 28 juin 1994 ;
Vu le rapport de transmission du préfet du département des Ardennes en date du 26 octobre 1994 ;
Vu l'avis du Conseil national de la protection de la nature en date du 29 mars 1995 ;
Vu les avis et accords des ministres intéressés ;
Le Conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu,
Décrète :
Chapitre Ier
Création et délimitation de la réserve naturelle
de la pointe de Givet
Art. 1er. - Sont classées en réserve naturelle, sous la dénomination de « réserve naturelle de la pointe de Givet » (Ardennes), les parcelles cadastrales suivantes, y compris les grottes situées dans le sous-sol de ces parcelles, excepté la grotte de Nichet :
Commune de Charnois
Section A 1 : parcelles nos 1 à 7, 9 à 12, 81 à 83, 86, 87, 309 (pour partie) et 334 (pour partie).
Commune de Chooz
Section A 1 : parcelles nos 2135 (pour partie), 2405, 2407, 2721, 2742, 2805, 2811 et 2816.
Section C 1 : parcelles nos 17, 19, 24 à 27, 178, 179, 230 et 232.
Commune de Foisches
Section A 2 : parcelle no 173 (pour partie).
Section B : parcelles nos 105, 107 et 108.
Commune de Fromelennes
Section B 1 : parcelles nos 1 (pour partie) et 169 (pour partie).
Commune de Givet
Section AM : parcelles nos 49 et 50.
Section AR : parcelles nos 6, 16 à 26, 27 (pour partie), 28 à 30, 31 (pour partie), 32 (pour partie), 33, 35, 36, 40, 45, 47, 48, 49 (pour partie), 50 et 52.
Section AT : parcelles nos 22 (pour partie) et 39 (pour partie).
Commune de Rancennes
Section A : parcelles nos 86 (pour partie), 156 à 159, 197, 198, 200, 476, 513 (pour partie) et 514.
Section B 2 : parcelles nos 106 à 113, 236, 241, 243 à 248, 298, 381 et 382.
Section C : parcelles nos 41 et 58,
ainsi que les emprises des chemins non cadastrés inclus à l'intérieur du périmètre de la réserve, soit une superficie totale de 354 hectares 22 ares 09 centiares.
La route nationale 51 et la route départementale 4 sont exclues du périmètre de la réserve.
Le périmètre de la réserve naturelle est inscrit sur la carte IGN au 1/25 000 et les parcelles et emprises mentionnées ci-dessus figurent sur les plans cadastraux aux 1/1 000, 1/2 000 et 1/2 500, pièces annexées au présent décret et qui peuvent être consultées à la préfecture des Ardennes.
Chapitre II
Gestion de la réserve naturelle
Art. 2. - Le préfet, après avoir demandé l'avis des communes de Charnois, Chooz, Foisches, Fromelennes, Givet et Rancennes confie par voie de convention la gestion de la réserve naturelle à une association régie par la loi du 1er juillet 1901, à une fondation, à une collectivité locale, à un établissement public ou à un propriétaire, sous réserve des dispositions de l'article 3 du présent décret.
Pour assurer la conservation du patrimoine naturel et de la biodiversité de la réserve, le gestionnaire conçoit et met en oeuvre un plan de gestion écologique qui s'appuie sur une évaluation scientifique du patrimoine naturel de la réserve et de son évolution. Le premier plan de gestion est soumis par le préfet, après avis du comité consultatif, à l'agrément du ministre chargé de la protection de la nature. Ce plan de gestion est agréé par le ministre après avis du Conseil national de la protection de la nature. Le préfet veille à sa mise en oeuvre par le gestionnaire. Les plans de gestion suivants sont, après avis du comité consultatif, approuvés par le préfet, sauf s'il estime opportun, en raison de modifications dans les objectifs de gestion, de solliciter à nouveau l'agrément du ministre.
Art. 3. - Sur les terrains compris dans la réserve et dont le ministère de la défense est affectataire, l'autorité militaire prend en compte les objectifs généraux de protection de la réserve naturelle, sans toutefois que la création de celle-ci fasse obstacle à la poursuite d'activités militaires existantes ou à la mise en oeuvre d'activités nouvelles que l'autorité militaire considérerait comme prioritaires. L'autorité militaire peut déléguer la gestion des espaces qui lui sont affectés à l'organisme désigné comme gestionnaire de la réserve naturelle.
Sur les autres terrains compris dans la réserve, l'autorité militaire ne conduit que des actions compatibles avec les objectifs de la réserve. A cet effet, un protocole peut être établi, en tant que de besoin, entre le préfet et l'autorité militaire, pour fixer les conditions de gestion des terrains sur lesquels s'exerceraient des activités militaires.
Art. 4. - Il est créé un comité consultatif de la réserve présidé par le préfet ou son représentant.
La composition de ce comité est fixée par arrêté du préfet. Il comprend :
1o Des représentants de collectivités territoriales intéressées, de propriétaires et d'usagers ;
2o Des représentants d'administrations et d'établissements publics intéressés ;
3o Des personnalités qualifiées dans le domaine scientifique et des représentants d'associations de protection de la nature.
Les membres du comité sont nommés pour une durée de trois ans. Leur mandat peut être renouvelé. Les membres du comité décédés ou démissionnaires et ceux qui, en cours de mandat, cessent d'exercer les fonctions en raison desquelles ils ont été désignés, doivent être remplacés. Dans ce cas, le mandat des nouveaux membres expire à la date à laquelle aurait normalement pris fin celui de leurs prédécesseurs.
Le comité se réunit au moins une fois par an sur convocation de son président. Il peut déléguer l'examen d'une question particulière à une formation restreinte.
Art. 5. - Le comité consultatif donne son avis sur le fonctionnement de la réserve, sur sa gestion et sur les conditions d'application des mesures prévues au présent décret.
Il se prononce sur le plan de gestion de la réserve.
Il peut faire procéder à des études scientifiques et recueillir tout avis en vue d'assurer la conservation, la protection ou l'amélioration du milieu naturel de la réserve.
Chapitre III
Réglementation de la réserve naturelle
Art. 6. - Il est interdit :
1o D'introduire à l'intérieur de la réserve des animaux d'espèce non domestique, quel que soit leur état de développement, sauf autorisation délivrée par le préfet, après consultation du Conseil national de la protection de la nature ;
2o Sous réserve de l'exercice de la chasse ou d'autorisation délivrée à des fins scientifiques par le préfet après avis du comité consultatif, de porter atteinte de quelque manière que ce soit aux animaux d'espèces non domestiques ainsi qu'à leurs oeufs, couvées, portées ou nids, ou de les emporter hors de la réserve ;
3o Sous réserve de l'exercice de la chasse ou d'autorisation délivrée à des fins scientifiques par le préfet après avis du comité consultatif, de troubler ou de déranger les animaux par quelque moyen que ce soit.
Art. 7. - Il est interdit, sauf à des fins agricoles ou forestières :
1o D'introduire dans la réserve tous végétaux sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation délivrée par le préfet, après consultation du Conseil national de la protection de la nature ;
2o De porter atteinte de quelque manière que ce soit aux végétaux non cultivés, ou de les emporter en dehors de la réserve, sauf à des fins scientifiques ou d'entretien de la réserve sur autorisation du préfet après avis du comité consultatif.
Toutefois, la cueillette des fruits sauvages et des champignons à des fins de consommation familiale est autorisée, mais peut être réglementée par le préfet après avis du comité consultatif sous réserve des droits des propriétaires et compte tenu des usages en vigueur à la date du présent décret.
Art. 8. - Le préfet peut prendre, après avis du comité consultatif, toutes mesures en vue d'assurer la conservation d'espèces animales ou végétales ou la limitation d'animaux ou de végétaux surabondants dans la réserve.
Art. 9. - La chasse s'exerce conformément à la réglementation en vigueur.
Art. 10. - Les activités agricoles, forestières ou pastorales sont autorisées. Elles sont réglementées par le préfet après avis du comité consultatif, compte tenu des objectifs de gestion de la réserve.
Art. 11. - Il est interdit :
1o D'abandonner, de déposer ou de jeter tout produit quel qu'il soit de nature à nuire à la qualité de l'eau, de l'air, du sol, du site ou à l'intégrité de la faune et de la flore ;
2o D'abandonner ou de déposer en dehors des lieux spécialement prévus à cet effet des détritus de quelque nature que ce soit ;
3o De troubler la tranquillité des lieux par toute perturbation sonore sauf pour l'exercice des activités prévues par le présent décret ;
4o D'utiliser le feu sauf pour l'élimination des rémanents et la gestion de la réserve ;
5o De faire des inscriptions autres que celles qui sont nécessaires à l'information du public ou aux délimitations foncières.
Art. 12. - Sous réserve de l'application de l'article L. 242-9 du code rural et de l'article 3 du présent décret, les travaux publics ou privés ainsi que les activités de recherche ou d'exploitation minières sont interdits. Toutefois sont autorisés par le préfet après avis du comité consultatif les travaux nécessités par l'entretien et la gestion de la réserve ainsi que la remise en état des chemins, l'entretien et la modernisation des installations existantes.
Art. 13. - La collecte des minéraux et des fossiles est interdite sauf autorisation délivrée à des fins scientifiques par le préfet après avis du comité consultatif.
Art. 14. - Toute activité commerciale ou industrielle est interdite. Sont seules autorisées les activités commerciales liées à la gestion et à l'animation de la réserve naturelle.
Art. 15. - Le préfet réglemente après avis du comité consultatif la circulation et le stationnement des personnes dans la réserve, à l'exception des agents des forces armées.
Art. 16. - Les activités sportives et touristiques, notamment les visites spéléologiques, sont réglementées par le préfet après avis du comité consultatif.
Art. 17. - Il est interdit d'introduire dans la réserve des chiens, même tenus en laisse, à l'exception de ceux qui participent à des missions de police, de recherche, de sauvetage ou à des exercices de défense nationale et à l'exception des chiens de bergers pour les besoins pastoraux. Cependant, en période d'ouverture de la chasse, la circulation contrôlée des chiens est admise.
Art. 18. - La circulation de tout véhicule est interdite dans la réserve. Toutefois, cette interdiction n'est pas applicable :
1o Aux véhicules utilisés pour l'entretien et la surveillance de la réserve ;
2o A ceux des services publics ;
3o A ceux utilisés lors d'opération de police, de secours, de sauvetage ;
4o A ceux dont l'usage est autorisé par le préfet après avis du comité consultatif, en particulier pour la gestion des fonds ruraux.
Art. 19. - Le campement sous une tente, dans un véhicule ou dans tout autre abri est interdit. Le bivouac est autorisé, sauf interdiction prononcée par le préfet après avis du comité consultatif. Toutefois le bivouac pratiqué dans le cadre des activités militaires ne peut faire l'objet d'une telle interdiction.
Art. 20. - Le ministre de la défense et la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 4 mars 1999.